Drogues : les dangers du gaz hilarant ou protoxyde d’azote

Consommer du "gaz hilarant" ou protoxyde d’azote sous forme de cartouche comporte des risques. La vente de ces cartouches aux mineurs est interdite par la loi depuis le 23 février 2022.

© Steve Closset

Le protoxyde d’azote, un gaz hilarant

Le "gaz hilarant", du protoxyde d’azote, est utilisé en médecine et dans l’industrie, en ce compris alimentaire. En médecine et dentisterie, il est utilisé pour relaxer, voire anesthésier le patient tandis que dans l’industrie alimentaire, on le retrouve entre autres conditionné sous forme de cartouches métalliques. Celles-ci ont un rôle propulseur dans des crèmes telles que la chantilly ou les espumas, sorte de mousses préparées avec l’aide d’un siphon.

C’est sous forme de cartouche que le gaz hilarant est consommé de manière récréative, notamment par des mineurs et de jeunes adultes. 

 

Vente interdite aux mineurs

Les cartouches sont en vente dans les magasins d’électroménager, dans des supermarchés et sur Internet. Depuis le 23 février 2022, une loi interdit la vente de cartouches métalliques contenant du protoxyde d'azote aux mineurs. Que ce soit en vente directe ou en ligne, l’interdiction doit être spécifiée. Par ailleurs, une mention indiquant la dangerosité du protoxyde d'azote doit être apposée sur chaque contenant et notamment sur les cartouches destinées aux siphons alimentaires.





Probable trafic de protoxyde d’azote 

En Belgique, la police de la zone Bruxelles-Ouest a saisi dans une habitation, en juin 2021, 60 bonbonnes de protoxyde d’azote, soit près de 6.000 doses potentielles. Les bonbonnes auraient été acheminées depuis les Pays-Bas, en vue d’être conditionnées en Belgique puis expédiées et revendues en Espagne. En octobre 2019 déjà, un trafiquant de gaz hilarant d’origine néerlandaise avait été arrêté par les polices belges et néerlandaises qui ont retrouvé un stock de 50 tonnes de protoxyde d’azote dans un hangar, à Saint-Nicolas près d’Anvers. 

En France, la police nationale a procédé début janvier 2022 à la saisie de 16 tonnes de bouteilles de protoxyde d’azote en Seine-et-Marne, soit 7 tonnes de gaz encapsulé. Auparavant, en octobre 2021, 4 tonnes de protoxyde d'azote avait été saisies à Villeurbanne (région de Lyon).





Inhalation du gaz : effets recherchés 

Le gaz hilarant a un effet psychoactif. Ainsi, en tant que psychotrope, il peut modifier le psychisme et le comportement de celui qui l’inhale. Euphorisant, il provoque essentiellement un état proche de l’ivresse accompagné de rires irrépressibles, d’éventuelles distorsions visuelles et/ou auditives ainsi qu’une modification de la voix.

Mais pas seulement. Les effets secondaires peuvent en effet être variés : nausées, vomissements, maux de tête, crampes abdominales, désorientation, difficulté à parler ou à coordonner ses mouvements, faiblesse musculaire, irrégularités du rythme cardiaque, etc. 

 

Type d’usage et risques associés

La consommation semble être en augmentation chez les jeunes, quoiqu’elle reste de loin inférieure à celle observée pour l’alcool et le cannabis. Selon l’enquête HBSC 2018, environ 3% des élèves wallons et bruxellois scolarisés dans l’enseignement secondaire supérieur (2ème et 3ème degrés) ont déjà consommé du protoxyde d’azote au moins une fois dans leur vie. Il s’agit le plus souvent d’un usage expérimental ou occasionnel.

Dans un rapport couvrant la période 2006-2012, une équipe de chercheurs de l’Université de Londres a compilé les rapports de médecins légistes et comptabilisé 17 décès causés, directement ou indirectement, par l’inhalation de gaz hilarant. Six d’entre eux étaient dus à l’asphyxie provoquée par le manque d’oxygène.

À chaque prise, la personne qui inhale directement à la cartouche risque des brûlures par le froid au niveau du nez, de la bouche et/ou des cordes vocales, d’où la nécessité de préalablement détendre le gaz dans un ballon de baudruche afin qu’il puisse se réchauffer au contact de l’air avant de le consommer. En outre, la possibilité d’un déséquilibre et d’une chute est réelle, avec les conséquences traumatologiques que cela peut avoir.

À usage régulier, l’inhalation peut causer des pertes de mémoire, des troubles de l’érection, des troubles de l’humeur avec une tendance à développer des pensées paranoïaques. Certaines personnes sont également sujettes à des hallucinations visuelles, des troubles du rythme cardiaque, une baisse de la tension artérielle.

L’usage chronique à forte dose risque de provoquer une carence en vitamine B12, ce qui peut affecter la moëlle épinière et causer des sensations de fourmillements aux extrémités des membres et de décharges électriques au niveau de la nuque. Parfois également une anémie (diminution du nombre de globules rouges et pâleur extrême de la peau). Lors d’une overdose se manifestent des troubles moteurs, une altération de la perception, des convulsions, voire une détresse respiratoire pouvant entraîner la mort.

Fort heureusement, dans la grande majorité des cas, les troubles causés sont réversibles. Une minorité de consommateurs pourraient aussi développer une dépendance au produit, bien qu’il soit considéré comme peu addictif en raison des désagréments qu’un usage excessif occasionne (maux de tête, nausées, faiblesse musculaire, etc.).

Le seul risque vital est donc l’asphyxie. En effet, l’usage médical du protoxyde d’azote est sans danger car les bonbonnes contiennent toujours 50% d’oxygène et 50% de protoxyde d’azote. Les bonbonnes "culinaires" sont remplies quasi exclusivement de protoxyde d’azote sans oxygène. Donc, au mieux, le jeune inhale les 21% d’oxygène ambiant …mais s’il ne respire pas entre quelques bouffées de protoxyde d’azote, il n’a plus aucun apport extérieur en oxygène. 

 

Insister sur les risques en cas de consommation

Les individus qui souhaitent ou persistent à inhaler le gaz en question doivent être conscients des différents risques : chutes possibles si on est debout, brûlures (par le froid) si on inhale en étant en contact direct avec la cartouche et bien évidemment, si la cartouche est proche d'une flamme.

Et les risques peuvent être plus graves pour les consommateurs qui multiplient les prises, ne respirent pas de l’air entre les prises (risque d’asphyxie), combinent ces inhalations avec d'autres substances psychotropes ou prennent le volant ensuite (somnolence). 

 

Avec la collaboration d’EUROTOX





Sandrine MATHEN

Licenciée en Psychologie clinique



Frank VAN TRIMPONT

Docteur en médecine



Sources :

Informations produits, Les solvants, Le protoxyde d’azote. Infordrogues

L’usage détourné de protoxyde d’azote en Belgique francophone : mise à jour de la situation épidémiologique, EUROTOX

11 FEVRIER 2021. Loi modifiant la loi du 24 janvier 1977 relative à la protection de la santé des consommateurs en ce qui concerne les denrées alimentaires et les autres produits, visant à interdire la vente de cartouches métalliques contenant du protoxyde d'azote aux mineurs

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