"Blind betting" : une campagne contre l’exploitation sexuelle

Afin de prévenir et protéger les jeunes filles victimes des "loverboys" et des réseaux criminels actifs notamment en Europe de l’Est, la campagne de sensibilisation Blind Betting a récemment été lancée. En quoi consiste-t-elle ?  

 

© Secunews

Objectifs de la campagne

Cette campagne a été conçue par la Bulgarie, pays notablement touché par le phénomène. C’est dans le domaine du jeu, en l’occurrence le poker, qu’elle a puisé la métaphore du « Blind betting », soit du « pari à l’aveugle », celui d’un joueur qui mise de manière irréversible sans avoir vu ses cartes.

Il s’agit bien de cela lorsque des jeunes filles, séduites par des « loverboys » ou persuadées par des malfaiteurs, se laissent convaincre par de fausses promesses et finissent comme victimes de réseaux criminels qui les exploitent sexuellement.



Les objectifs poursuivis par la campagne :

  • Attirer l’attention de l’opinion publique sur l’exploitation sexuelle ;
  • Informer les groupes cibles – principalement des jeunes filles – des dangers de se faire recruter dans des réseaux de prostitution en les invitant à ne pas risquer leur destin (par référence au poker) ;
  • Rappeler qu’il existe des services d’aide aux victimes qui peuvent les aider à en sortir.

 

L’Union européenne prend la main

L’initiative bulgare a fait tache d’huile dans les 26 pays de l’Union européenne et elle a été soutenue par la plate-forme « EMPACT » (European Multidisciplinary Platform Against Criminal Threats) pilotée par Europol. Il s’agit d’un plan d’actions développé dans le cadre du cycle politique de lutte contre la criminalité organisée de la Commission Européenne.

Rappelons que les pays de l’UE ont décidé en 2021 de faire de l'EMPACT un instrument permanent afin de lutter contre la grande criminalité organisée. Dans ce cadre, les États membres, les agences et autres partenaires de l'UE coopèrent en menant des actions opérationnelles conjointes afin de démanteler les réseaux criminels.

L’initiative « Blind betting » est menée par les services centraux des divers services de police européens actifs dans la lutte contre la traite des êtres humains, sous l’égide d’EUROPOL. La campagne, livrée « clé sur porte », est adaptée et diffusée en fonction des réalités de chaque pays concerné.





Et en Belgique ?

La Belgique a confié le pilotage du projet à la police judiciaire fédérale, en tant que membre de la Cellule interdépartementale de coordination de lutte contre le trafic d’êtres humains (TEH). Divers services ont notamment été associés à l’initiative dont le SPF Justice, Myria et les trois centres spécialisés dans l’accueil des victimes de la traite des êtres humains : Pag-asa, Payoke et Surya.  

La teneur du message :

« Ils vous promettent le luxe et une histoire d'amour... A la place, vous recevez du glamour bon marché et un avenir incertain. Chaque année, des centaines de jeunes femmes jouent leur avenir sur une seule carte. Ne jouez pas avec votre destin. La Traite des Êtres Humains à des fins d'exploitation sexuelle est un crime. En Belgique, il existe un système de protection et d'assistance aux victimes de la TEH. Trois centres sont mandatés par les autorités fédérales pour accompagner les victimes dans ce cadre : Bruxelles : www.pag-asa.be Liège : www.asblsurya.org ; Anvers : www.payoke.be »



Aujourd’hui, en Belgique comme dans d’autres pays, l’on constate que l’exploitation sexuelle n’est plus seulement le fait de réseaux criminels mais que d’autres pratiques sont courantes : des « loverboys » séduisent des jeunes filles pour les forcer à se prostituer ; au sein de couples, l'homme oblige sa partenaire à se prostituer ; des jeunes filles mineures, souvent défavorisées, constituent des cibles faciles vu leur vulnérabilité, etc.

Sur le plan quantitatif, en 2020, on observe que les parquets ont ouvert 233 nouveaux dossiers d'exploitation sexuelle et 52 victimes – seulement - ont bénéficié de la procédure de protection dans le cadre de la traite des êtres humains. La campagne belge a notamment pour but de convaincre plus de victimes, souvent freinées par la peur ou par la honte, d’emprunter le chemin des centres spécialisés car l’on doit déplorer le nombre limité de celles qui y font appel.

Une difficulté majeure pour les services chargés de la répression de cette forme d’exploitation mais aussi pour tous les services d’aide, vient de ce qu’elle est peu visible, d’autant que plus fréquemment, les auteurs utilisent les facilités et la discrétion qu’offrent les réseaux sociaux. L’Internet permet à la fois d’approcher plus aisément les victimes potentielles, notamment des mineures, de se libérer des frontières et de proposer des services à caractère sexuel.

Cela implique également qu’il s’avère de plus en plus compliqué de retrouver les victimes, de localiser les sites d'exploitation et, par conséquent, de répondre à la principale préoccupation des acteurs sur le terrain : apporter aide et soutien aux personnes exploitées. 

On comprend dès lors que l’un des axes majeurs de la campagne belge porte sur la diffusion des coordonnées des services d’aide aux victimes.

 

Claude BOTTAMEDI

Chef de corps d’une zone de police er



Pour en savoir plus, voir notamment :« La campagne « Blind Betting » : un éclairage sur l’exploitation sexuelle », SPF Intérieur, sur :

https://www.besafe.be/fr/actualit%C3%A9s/la-campagne-blind-betting-un-eclairage-sur-lexploitation-sexuelle

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