VICLAS contribue à élucider les crimes en série sexuels et/ou violents

Les enquêtes relatives aux crimes sexuels et/ou violents en série s’avèrent complexes car, chacun d’eux, pris isolément, fournit peu d’éléments probants, soit parce que certains auteurs sont précautionneux, soit parce que les crimes sont parfois très distants dans le temps et dans l’espace, ou encore parce que la scène de crime ne révèle aucun élément matériel exploitable. Comment dès lors vérifier l’existence de liens entre plusieurs crimes ?  

 

Ainsi, à la fin du XXème siècle, la police a appris à utiliser des outils informatiques dans la lutte contre la criminalité, des outils d’analyse criminelle. Dès 1985, le FBI utilisait le programme VICAP (Violent Crime Apprehension Programme). Il faudra attendre 1992 pour que la Gendarmerie royale du Canada développe son système VICLAS (Violent Crime Linkage Analysis System), inspiré par VICAP, et adopté par la Belgique en 2003. De quoi s’agit-il ?

© Federale Police - Polimagery

L’outil VICLAS

 

VICLAS permet de chercher et d'examiner les liens possibles entre faits criminels sexuels et/ou violents. En d’autres termes, les enquêteurs peuvent vérifier si un crime fait partie d’une série déjà enregistrée en comparant des informations provenant de différents faits.



Les liens peuvent être mis en évidence de différentes manières, notamment par la similitude du mode opératoire voire par l’idiosyncrasie de l’auteur, c’est-à-dire le comportement particulier, propre à un individu. Il sera donc tenu compte, non seulement des traces et indices, mais aussi du comportement (préférences sexuelles, manière de s’exprimer, recours à la violence…) et de la motivation de l’auteur, du type d’environnement où les faits sont commis ou encore de leur localisation.

 

VICLAS facilite aussi la communication et la coopération entre services de police. Actuellement, les pays suivants l’utilisent : le Canada, la Nouvelle-Zélande, l’Allemagne, la Belgique, le Royaume-Uni, l‘Irlande, les Pays-Bas, l’Autriche, la France, la République tchèque et différents Etats des USA.



Enfin, cet outil aide les enquêteurs à orienter les recherches et à prioriser les différentes hypothèses, ce qui s’avère extrêmement utile dans le cadre de dossiers complexes pour lesquels les moyens sont comptés.

 

 

Utilisations de VICLAS



Si VICLAS peut être utilisé pour les enquêtes relatives à des événements criminels violents, comme des homicides, il trouve tout son intérêt en matière de délinquance sexuelle. Il convient cependant de préciser que la plupart des faits concernés sont commis hors de la sphère familiale ou relationnelle.



Concrètement, VICLAS indiquera une relation éventuelle entre plusieurs faits non élucidés ou entre faits dont l’auteur a été identifié. On le comprend, l’intérêt est double. Si un auteur a été identifié, il s’agira de vérifier si d’autres faits « reliés » peuvent lui être imputés. Si aucun auteur n’a été identifié dans une série de faits reliés par VICLAS, la réunion des indices et autres éléments partiels recueillis lors des différentes enquêtes peut suggérer des nouvelles pistes.



En d’autres termes, VICLAS ne remplace pas les enquêteurs mais il les aide, notamment en comparant de nombreuses données difficilement gérables par le seul esprit humain.



 

VICLAS en Belgique



VICLAS est géré par le service des Sciences comportementales de la direction centrale de la police technique et scientifique de la police fédérale. Des analystes de ce service ont été formés par la Gendarmerie Royale du Canada et leur expertise confirmée au niveau international.

Afin de respecter les données à caractère personnel, seuls les membres du service agression de la police judiciaire fédérale ont accès aux données de VICLAS.



Que contient la banque de données ? Celle-ci comprend : des données administratives (n° du PV, nom de l’enquêteur…), les données de la victime (description, mode de vie…) et de l’auteur connu ou inconnu (description, habitudes sexuelles, etc.), les moyens utilisés (transport, armes, précautions, etc.), la description des lieux (scène de crime), les faits (interactions auteurs/victimes, motivation, etc.) et la chronologie des événements. La version 4.0 de VICLAS se base sur un questionnaire de 156 items.



A minima, car la liste peut évoluer, les faits suivants doivent être insérés dans VICLAS : les faits de mœurs (viols, attentats à la pudeur avec violences ou menaces et les enlèvements avec une finalité sexuelle) et les faits d’homicide uniquement s’ils présentent une connotation sexuelle et/ou une violence extrême.

Sont toutefois exclus, les règlements de compte dans le milieu criminel, les crimes passionnels et les homicides consécutifs à des conflits familiaux. 

 

En Belgique, VICLAS a permis de réaliser des liens entre dossiers/auteurs, ce qui a été confirmé par des aveux ou par une identification génétique. Néanmoins, certaines recherches relativisent l’efficacité du programme. Ainsi, le grand nombre d’items rend chaque affaire trop spécifique, ce qui réduit la possibilité de faire des liens entre cas. En outre, il augmente le risque que les enquêteurs effectuent différemment les encodages.





Il faut donc considérer VICLAS pour ce qu’il est : un outil d’aide à l’enquête, un outil qui peut sans doute être amélioré.

Christophe LARBALESTRIER

Analyste ViCLAS, DJT/ZAM







Sources :

Julien CHOPIN et Marcelo F. AEBI, Les données de police permettent-elles la détection des agresseurs sexuels sériels ? Une analyse de la validité concourante de VICLAS  in Revue internationale de criminologie et de police technique et scientifique, 1/2018, PP. 21-35. 

 

Col 04/2020 – Circulaire commune du Ministre de la Justice, du Ministre de la Sécurité et de l’Intérieur et du Collège des Procureurs généraux relative à la recherche de liens potentiels entre des faits ayant une motivation sexuelle et/ou violente.

 

Davies, K., Imre, H., & Woodhams, J. (2016). A test of the interrater reliability of the Violent Crime Linkage Analysis System (ViCLAS) coding in Belgium. Manuscript submitted for publication.

 

M. Tonkin, T. Pakkanenb, J. Sirénc, C. Bennelld, J. Woodhamse, A. Burrellf, H. Imreg,J.M. Winterh,i, E. Lamh, G. ten Brinkeh, M. Webbj, G.N. Labuschagnek, L. Ashmore-Hillsl,J.J. van der Kempm, S. Lipponenn, L. Rainbowj, C.G. Salfatio, P. Santtilab, Using offender crime scene behavior to link stranger sexual assaults: A comparison of three statistical approaches, in Journal of Criminal Justice, n° 50, 2017.

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