Pandémie : l’influence des gourous sur les réseaux sociaux

La pandémie et les restrictions sanitaires ont fait le lit de mouvements aux pratiques douteuses, parfois sectaires. Ces « gourous.net », à l'instar de certains groupes religieux radicaux, axent leurs discours sur la santé et s’opposent aux restrictions sanitaires.

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Gourous version COVID 



L’ultra médiatisation de cette pandémie, les mesures de confinement décidées par les autorités, les craintes liées à la vaccination et les débats scientifiques contradictoires engendrent auprès d’une partie de la population un grand sentiment d’incertitude, de perte de contrôle de leur vie pouvant provoquer une détresse psychologique. Les plus fragilisés chercheront un soutien psychologique sur l’Internet via les réseaux sociaux, outil idéal pour exprimer son mal-être. Ne nous leurrons pas, les réseaux sociaux ne sont qu’un moyen de séduction et de recrutement idéal pour ces gourous d’une nouvelle génération.





Ces « gourous.net », délaissent le registre classique du spirituel au profit de la santé et du développement personnel beaucoup plus proche des préoccupations actuelles des gens. Leur outil de prédilection : les réseaux sociaux qui sont actuellement beaucoup plus consultés et ont stimulé la diffusion de théories du complot, réponse émotionnelle à l’incertitude, la sidération, l’anxiété.



Internet leur permet d’atteindre un public plus important que par les moyens classiques (conférences, réunions, contact personnel, …) bien entendu. Il offre l’avantage de pouvoir créer des communautés 100% virtuelles, accessibles en permanence et uniquement pour ses membres, sans limite territoriale, et pratiquement sans contrôle. Même si les fournisseurs de services tels que Facebook ou Twitter interviennent progressivement.



Les médias sociaux leur autorisent également la diffusion de théories suspicieuses sur les manières d’appréhender cette crise liée à la COVID, en contestant les mesures prises par les autorités, en tenant des discours antivaccins et pour certains, en poussant à l’adhésion aux thèses complotistes.





Ces « gourous.net » proposent des solutions qu’ils prétendent être nettement plus efficaces que celles proposées par les autorités sanitaires. Ces méthodes composées d’arguments pseudo-scientifiques, d’un peu de spiritualité, de traitements dits naturels aboutissant parfois à l’exercice illégal de l’art de guérir, ont la prétention d’apporter des solutions simples à un problème complexe. Bien entendu, ces solutions exigeront de la part du demandeur un investissement financier qu’il pourra effectuer en ligne, sans aucune garantie de résultats …



Il s’agit tout simplement de méthodes de recrutement basées sur la peur, l’angoisse et la détresse ressenties par de nombreuses personnes. Une fois la personne conquise par ces théories, elle pourra subir un processus d’endoctrinement qui risque à terme de l’amener à une dépendance psychologique à l’égard de ces nouveaux gourous avec toutes les conséquences qui peuvent en découler (rupture familiale et sociale, pertes financières conséquentes…)



 

Convictions religieuses et spirituelles



En outre, certains groupes religieux radicaux ou à caractère sectaire, sous le couvert de la liberté des cultes, ainsi que de la liberté de manifester ses opinions en toute matière, rejettent et refusent de se conformer aux règles sanitaires imposées par les autorités en vue de protéger la population et d’éviter la propagation de ce virus.



Les dirigeants de ces groupes incitent ainsi leurs adeptes à ne pas respecter la distanciation sociale, le port du masque et surtout la vaccination car seule la foi pourra les sauver. Selon eux, accepter de suivre la règle des hommes revient à s’écarter du chemin désigné par leur créateur.

Fort heureusement, ces communautés religieuses sont minoritaires mais elles peuvent malgré tout constituer un cluster de contaminations facilement évitable.



 

Comment réagir ?



Lorsqu’on est face à un discours lié à des croyances, on est souvent confronté à l’irrationnel. Il est alors difficile d'opposer des éléments factuels relevant tout simplement du bon sens, voire des données scientifiques incontestables qui seront écartées par ces « croyants ». A leurs yeux, ces données n’ont aucune valeur car seuls leurs écrits et/ou doctrine sont le reflet de la vérité ! Il est dès lors plus indiqué lors des échanges avec ces personnes, de tenir compte de l’émotionnel et non du rationnel, en cherchant à comprendre comment elles en sont arrivées là. Chercher à comprendre est une des clefs.



On peut tenter de sensibiliser ces personnes à l’esprit critique, leur faire comprendre qu’un virus ne fait aucune différence entre les personnes, les genres, les croyants ou non croyants, et qu’il ne s’agit pas simplement d’un choix individuel mais bien d’un enjeu collectif. Développer l’esprit critique est une autre clef.



Les fournisseurs de réseaux sociaux se rendent également compte qu’ils jouent un rôle dans la diffusion de théories complotistes, la publicité pour des remèdes thérapeutiques dangereux ou la désinformation de manière plus générale. Ces derniers mois, ils émettent des mises en garde pour nombre de publications, voire procèdent à la suppression de comptes. Etant donné l’ampleur des messages réfractaires et sectaires sur les réseaux sociaux, l’impact de ces interventions reste néanmoins encore fort limité.







Dany LESCIAUSKAS

Commissaire de police er

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