Les obstacles fixes pour contrer les attaques au camion-bélier

Dans un contexte terroriste ou de grand banditisme, est-il possible d’empêcher une voiture ou un camion-bélier de traverser un périmètre sécurisé ou de pénétrer dans l’enceinte d’un bâtiment sensible ? Passons en revue les obstacles fixes anti-véhicules hostiles qui existent actuellement.



Précisons tout d’abord que le terme « obstacles fixes » correspond aux dispositifs intégrés et/ou fixés au sol ou à d’autres structures architecturales permanentes. N’entrent donc pas en considération ici les systèmes simplement posés au sol, même lorsqu’un poids et/ou volume important prédispose à les considérer comme fixes.

Ce domaine de la sécurité / protection est désigné « Hostile Vehicle Mitigation » (HVM) par les anglo-saxons. 

© EUROPOL

Les clôtures et autres éléments statiques anti-véhicules des périmètres 



Les issues normales d’un périmètre ne sont pas les seules à être exposées aux véhicules. Les clôtures périmétriques peuvent être protégées « HVM » par l’usage de poteaux lourds implantés plus densément, éventuellement avec embases surélevées (socles) en béton.

Des bornes (bollards) anti-véhicules peuvent s’installer derrière les éléments de clôture anti-personnel. Des glissières horizontales résistantes peuvent aussi être fixées entre les poteaux.

Il existe en outre des dispositifs anti-véhicules recourant à de gros câbles parallèles, tendus entre des bornes et/ou des poteaux fort implantés. 

Mais on peut aussi réaliser des obstacles discrets et esthétiques en composant et/ou combinant avec imagination divers éléments architecturaux appropriés. Exemple : des murets en béton se présentant comme des bancs et tables publics. 

L’édification d’une forte base bétonnée renforce la stabilité et la puissance globale de la clôture.       © Christian TILLE

 

L'intégration physique forte des solutions architecturales avec les lieux les rend souvent plus fiables.   © Christian TILLE 





Les barrières levantes



Emblématiques du contrôle d’accès « véhicules », les barrières levantes peuvent voir leur lisse dotée intérieurement d’un câble anti-véhicules. La tête de lisse s’embosse alors dans un réceptacle anti-arrachement.

On trouve aussi des barrières levantes lourdes dotées de plusieurs lisses/poutres parallèles qui, en position de fermeture, sont bloquées en des réceptacles renforcés.

Certaines barrières levantes sont articulées sur deux axes latéraux et la lisse renforcée forme la base d’un U. Quand l’obstacle est ouvert, la lisse stationne au-dessus ou au-dessous du passage des véhicules.

Considérations : les barrières levantes renforcées sont généralement rapides et fiables mais la protection anti-personnel offerte est moins crédible que leurs capacités anti-véhicules. 





Les portails coulissants



Les portails avec rail au sol ou autoportants/Cantilever sont très répandus pour la fermeture des grands sites industriels et commerciaux. Leur largeur peut être importante. Ils disposent souvent d’une résistance structurelle appréciable, encore renforcée dans les modèles de haute sécurité. Certains dispositifs consolidés de volumes lourds roulent sur 2 rails parallèles et sensiblement distants, ce qui augmente l’inertie anti-véhicules de l’ensemble.

Considérations : ces dispositifs présentent une très bonne résistance anti-véhicules et une bonne capacité anti-personnel mais ils exigent beaucoup d’espace latéralement et sont trop lents pour gérer des flux soutenus de véhicules. 

Ce portail coulissant est du type suspendu. Celui-ci est prioritairement prévu pour une fonction anti-véhicules.    © Christian TILLE

Sur les abords latéraux, on a misé ici sur des volumes lourds et décoratifs. Une cabine blindée accueille un garde.

 

Les obstacles escamotables



En mode blocage, les équipements de type Rising step ou Wedges barriers font émerger rapidement du sol une forte structure oblique et plate destinée à bloquer net un véhicule hostile. Le volume ainsi créé sous la « marche » en coin, est entouré d’une paroi souple ou rigide/ télescopique dotée d’une forte signalétique visuelle. 

© Christian TILLE

Au centre des 2 images, un obstacle escamotable type rising step ou wedge barrier. Cet exemplaire est massif et de haute taille (voir à droite). L’image de gauche montre une zone d’accès type, avec ses sous-ensembles classiques. Ainsi le rising step est en bout du sas pour véhicules, complété au fond et latéralement, par des portails et des clôtures anti-personnel. Elles-mêmes protégées par des bornes anti-véhicules. Des barrières levantes légères, avec feux de signalisation, assurent la gestion des mouvements et évitent tout impact accidentel sur les obstacles lourds. La voie d’entrée est physiquement séparée de la voie de sortie. Un terminal de contrôle d’accès automatisé est présent côté conducteur. L’intervention directe des gardes reste possible : ils disposent d’un volume protégé opportunément sis en position médiane et offrant une vue rapprochée sur les véhicules. Enfin, la zone d’accès est couverte par des projecteurs latéraux correctement implantés.



Les Rising step existent en de nombreuses tailles et présentent parfois une hauteur de plus de 1 mètre. Les plus classiques nécessitent de profondes fondations en béton armé mais d’autres ne requièrent que 30 ou 40 cm d’imbrication dans le sol.



Très bonne résistance anti-véhicules, rapidité de l’ordre de 5 sec, bonne endurance et adaptés aux flux de circulation fortement cadencés. Mais pas d’aptitudes anti-personnel et incompatibilité si passage de piétons et capacité anti-véhicules doivent coexister.





Les bornes ou bollards anti-véhicules



Les modèles de bornes ou bollards sont très nombreux. Tout autant que leurs niveaux de prestations, normés ou pas. Ils peuvent être de section ronde, carrée, rectangulaire ou triangulaire, mais aussi présenter une forme incurvée, en arceau ou même en cloche. Nous ne traitons pas ici des potelets anti-stationnement.



Il faut distinguer les bollards statiques des bollards dynamiques. Les premiers restent en position initiale, les seconds peuvent s’escamoter dans le sol grâce à un système électromécanique ou hydraulique. Une variante rare peut coulisser latéralement dans des glissières au sol.

Dans les 2 catégories, certains bollards, même d’allure imposante, ne sont conçus que pour la dissuasion : ils s’inclinent ou cassent net pour absorber une partie de l’énergie d’impact en cas de collision accidentelle.

Les bollards de haute sécurité exigent des travaux de génie civil substantiels. Outre leurs qualités mécaniques, la densité, la cohérence et la continuité de leur implantation sont essentielles.



 

 © Christian TILLE

Les bornes ou bollards sont emblématiques des obstacles anti-véhicules, mais leur fabrication et leur installation doivent être conformes et validées pour atteindre les prestations attendues. Les modèles escamotables dans le sol, requérant un plus grand espace en sous-sol, sont plus rares, les sols urbains étant souvent très encombrés.

Important : Certaines bornes escamotables empêchant l’accès des véhicules à des rues ou à des places publiques, sont conçues pour casser à l’impact d’un véhicule, la priorité étant ici de limiter les conséquences d’une collision accidentelle. Pas d’arrêter un véhicule hostile. 

 

Les portails pivotants classiques à double battant



Ces portails équipent souvent les infrastructures anciennes. Les battants sont suspendus à des murs ou des montants. Le verrouillage principal est implanté au centre mais peut parfois être complété par des renforts, des arrêts au sol ainsi que des pènes transversaux et/ou verticaux pénétrant dans le sol, latéralement et en haut, dans un éventuel linteau.

Mais un puissant choc cinétique à la jonction des battants occasionnera toujours un effet défavorable de bras de leviers. D’autant que ces portails s’ouvrent souvent vers l’intérieur.

 

Engin à double battants en flèche. Ici l’Arrowgate belge.          © Christian TILLE 

Ces engins sont des obstacles puissants à mouvements rapides. Ils combinent la capacité anti-véhicules et anti-personnel et sont souvent appropriés pour clore des sas de contrôle d’accès véhicules. Apparentés aux portails pivotants à double battant, leur grande spécificité est de former un angle droit (90°) entre eux en position fermée. En s’appuyant mutuellement, ils constituent une puissante flèche dirigée vers le véhicule en approche. Cette configuration, associée à des supports latéraux renforcés, assure une résistance à l’impact et une forte capacité de neutralisation. En outre, les battants ayant une course angulaire limitée à 45°, le passage est obturé quasiment 2 fois plus vite que dans le cas d’un portail (à motorisation égale). Et si la course angulaire n’a pas été achevée lors d’une attaque de véhicule, l’impact de ce dernier sur les battants, ferme automatiquement l’obstacle. 





Les portails à battant unique suspendus d’un côté



Le battant unique suspendu d’un seul côté du passage peut facilement être doté d’une bonne résistance homogène si la suspension et ses soutiens sont du niveau qualitatif requis. Ce type de portail peut se verrouiller efficacement dans une structure latérale, solidaire d’un montant ou d’un mur. Ce qui est bien plus robuste qu’au milieu du passage. 

 

Les portails pivotants à battants articulés en accordéon ou en portefeuille



Dans ces dispositifs, les battants sont généralement suspendus par un dispositif de roulement siégeant dans un linteau métallique creux. Certains coulissent en outre dans un rainurage présent au sol. Ces équipements se prêtent bien à une motorisation rapide, avec courroie crantée dans le linteau. Ces dispositifs conviennent surtout pour des emplacements abrités et visent une grande rapidité d’ouverture/fermeture pour la protection anti-personnel après chaque passage de véhicule. Les battants sont assez légers et leurs points de jonction/coulissement ne sont pas très massifs. Mais certains équipements revendiquent un bon niveau de résistance anti-véhicules.  

 

Portail rapide à battants articulés.           © Christian TILLE 

 

Les portiques à traverse horizontale mobile



Une forte traverse coulisse verticalement dans les montants verticaux du portique. Elle peut servir d’obstacle complet ou pour sélectionner, temporairement ou non, le gabarit des véhicules autorisés au franchissement. Une position permet le passage libre de tous les véhicules. 

 

Les herses fixes anti-véhicules



Outre les herses crève-pneus, mobiles et à usage policier, il existe des herses fixes, imbriquées dans le sol ou dans un ralentisseur émergeant. Elles sont associées avec une barrière levante et/ou peuvent compléter un portail pour faciliter le traitement des flux de circulation.

Deux catégories. La première utilise des pointes crève-pneus affûtées et de hauteur limitée (par ex 150mm) avec mouvements de sortie ou d’escamotage en 1 seconde. Elles ne peuvent pas détruire des pneus spéciaux ni bloquer immédiatement un véhicule à haute motricité.



La seconde catégorie utilise des lames fortes et épaisses s’érigeant à une hauteur moyenne de 700 mm. Leur multiplicité génère un barrage crédible pour s’opposer à un véhicule hostile. Mouvement en 3 secondes. L’imbrication du système dans le sol est limitée à quelque 350mm.     

 

Normes et spécifications applicables aux obstacles anti-véhicules



En mars 2019, trois systèmes sont disponibles pour catégoriser qualitativement les nombreux types et modèles d’obstacles anti-véhicules proposés sur le marché. 



Nous les décrivons dans le document en annexe à cet article. Nous y expliquons également comment interpréter les labels spécifiques attribués aux équipements testés.

A ce jour (mars 2019), on ne peut pas encore se référer à des normes établies par le CEN (European Committee for Normalization) en ce qui concerne la résistance à une attaque de véhicule hostile.

               

Christian TILLE

Commissaire de Police er

Spécialiste en protection technique anti-terrorisme



Sources :

https://www.ezisecurity.com.au/product-types/hostile-vehicle-mitigation-hvm/

https://www.zaun.co.uk/products/hostile-vehicle-mitigation/

https://www.frontier-pitts.fr/nos-produits/obstacles-escamotables

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