Les aires de jeux en toute sécurité : quel responsable ?
La gestion des risques sur les aires de jeux relève de la responsabilité des services communaux concernés, ainsi que des asbl et exploitants privés. Quelles sont les mesures de précautions exigées par la législation ? Quid des responsabilités civile et pénale ?

Une aire de jeux : de quoi parle-t-on ?
Une aire de jeux est tout terrain ou espace de détente où est installé au moins un équipement d’aires de jeux qui peut être utilisé collectivement par des enfants ou des jeunes de moins de 18 ans.
Exemples : la cour de récréation d’une école, une plaine de jeux, une garderie d’enfants, un parc de skate board, etc.
La législation applicable
Depuis l’arrêté royal du 28 mars 2001 relatif à l'exploitation des aires de jeux, la protection des jeunes utilisateurs des aires de jeux a été renforcée et la responsabilité des exploitants vis-à-vis de ces consommateurs particuliers augmentée.
Les obligations principales des gestionnaires concernent 5 grands thèmes :
- l’inventaire des aires,
- l’analyse des risques,
- la prise de mesures préventives,
- la mise sur pied de schémas d’inspection et d’entretien,
- la communication vis-à-vis des utilisateurs (…et de leurs parents).
Le texte s’articule autour de deux axes, l’un concernant la sécurité intrinsèque des équipements (engins) de jeu au sens strict et l’autre, requérant la bonne gestion de l’aire dans son ensemble (son implantation, son fonctionnement, son entretien, etc…).
Analyse des risques : le nez dans le concret
Une série d’éléments doivent être pris en compte afin de garantir la sécurité des aires de jeux. La législation prévoit plusieurs axes à traiter :
L’implantation de l’aire et des différents équipements doit être évaluée par rapport à la présence :
- d’une route (sorties et entrées balisées et sécurisées ?),
- d’un cours d’eau ou d’une pièce d’eau (séparation très utile),
- de plantations (non épineuses et non toxiques),
- d’une clôture (pas d’arêtes trop vives !).
L’état du sol
- il y a lieu de vérifier les possibilités de circulation sans risques aggravés de foulure, de trébuchement, de chute, d’interférence active ou passive par rapport aux activités sur les équipements.
Les zones d’utilisation, y compris les zones de chutes
- elles doivent être libres d’obstacles et de risques annexes. Il faut ainsi éviter tout chevauchement entre les zones (de chute et/ou d’utilisation) d’un équipement et celles d’un autre… ou avec les chemins de circulation.
Les balustrades
- elles doivent être mises en place pour prévenir tout risque de chute excessif. Des références techniques existent (norme EN 1176 p.ex.) en rapport avec la hauteur et l’âge des utilisateurs. Si elles n’ont pas de valeur obligatoire (une norme en tant que telle n’en a jamais), on veillera – au nom de la sécurité - à répondre à ces références techniques.
Les zones de « réception »
- leur surface et le choix du matériau employé pour leur recouvrement et l’épaisseur de la couche du produit absorbant doivent être optimalisés.
Le risque de coincement
- les parties mobiles, si elles sont mal étudiées ou entretenues, constituent un risque non négligeable de coinçage et d’écrasement de doigts.
Le risque de strangulation
- il est déjà arrivé par exemple que les cordons du capuchon soient coincés entre deux parties fixes au moment où l’enfant saute ou se laisse glisser.
L’inspection et l’entretien
Au-delà de la mise à niveau sécuritaire des aires de jeux, l’enjeu de cette réglementation consiste à maintenir ce niveau tout au long de la vie de l’aire de jeux et au gré de l’utilisation qui en est faite.
Le bon état ainsi que le bon fonctionnement nécessitent des inspections régulières, des contrôles périodiques et des entretiens. La fréquence de ces visites d’inspection dépend de la fréquentation des aires de jeux. Tout ceci est repris dans un schéma d’inspection et d’entretien auquel se soumet le gestionnaire.
Il convient de garder des traces écrites de toute intervention à finalité sécuritaire. Elles permettront au gestionnaire de démontrer l’existence d’une réelle stratégie quant à la sécurité des aires de jeux. Elles seront également utiles en cas d’accident et de recours exercé contre le ou les acteurs auxquels l’arrêté royal du 28 mars 2001 impose des obligations en vue de l'exploitation des aires de jeux.
Questions de responsabilités civile et pénale
Il y a peu de risque de responsabilité lorsqu’on fait de son mieux pour tenir ses aires en bon état d’entretien et de sécurité et plus particulièrement si on respecte les principes de l’arrêté royal susmentionné.
Mais en cas d’accident, la question de savoir par la faute de qui le dommage a été causé se posera toujours bien entendu.
Responsabilité civile : s’assurer est indispensable
Tous les exploitants d'aires de jeux (provinces, communes, asbl, exploitants privés…) sont concernés sur le plan de la responsabilité civile.
Un exploitant peut être condamné, si -par sa faute- il a occasionné un dommage à autrui.
Cette responsabilité civile peut heureusement être couverte par une assurance spécifique et la majorité des exploitants concernés y souscrivent par ailleurs.
Responsabilité pénale : Danger !
En matière d'exploitation des aires de jeux, nous devons examiner deux sources de responsabilité pénale.
La première découle de la loi relative à la sécurité des consommateurs du 9 février 1994, en exécution de laquelle l’arrêté royal du 28 mars 2001 a été pris.
Si une des instances, qui se voit imposer des obligations par l’arrêté royal du 28 mars, ne respecte pas les règles en question, elle peut encourir des peines prévues dans la loi.
Exemple : si un gestionnaire d’aire de jeux ne s’acquitte pas de son inventaire des aires ou de la numérotation des équipements ou de la programmation de mesures de prévention, de l’inspection, de l’entretien et de la maintenance, il risque une des peines précitées.
La seconde source de responsabilité pénale, ce sont les coups et blessures involontaires prévus par le code pénal : toute personne qui, du fait d’une négligence ou d’un défaut de précaution, a causé à une autre personne une lésion peut être poursuivie au correctionnel.
Le non-respect des obligations imposées par une loi constitue une négligence ou un défaut de précaution tel que visé dans le code pénal. Il suffit dès lors de ne pas avoir respecté la législation en question sur un point ou un autre pour risquer de se voir déjà reprocher une négligence.
Si l’assureur peut, dans le cadre d’une assurance protection juridique, prendre en charge les frais de défense, toute condamnation éventuelle est et reste un risque non assurable.
Conclusion
Depuis presque 20 ans, l’arrêté royal du 28 mars 2001 relatif à l'exploitation des aires de jeux a contribué à les rendre plus sûres et mieux protéger ainsi plus d’une génération d’enfants.
En cas d’accident, il s’agit de pouvoir démontrer que l’on a mis en œuvre une véritable stratégie de sécurisation des aires de jeux de son ressort. Lorsque l’on est cité en justice, il est plus sécurisant et beaucoup plus facile de disposer de documents établissant le cheminement de la politique de sécurité/prévention que l’on a menée en faveur des aires de jeux et … surtout de leurs utilisateurs que sont nos enfants.
Serge VAN LIEROP
Conseiller en prévention Niv. 1
Service Prévention Ethias
Sources :
Sécurité des aires de jeux et des équipements d’aires de jeux
AR du 28.3.2001 relatif à la sécurité des aires de jeux
AR du 28 mars 2001 relatif à l’exploitation des aires de jeux
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