L’archéologie forensique au service de l’enquête

L’archéologie forensique peut aider les enquêteurs à retrouver, identifier ou analyser des restes humains, qu’il s’agisse de la victime d’un crime, d’une catastrophe, d’un attentat ou de tout autre drame.

Dans ce type particulier de recherche, une maîtrise des techniques de prospection, de fouilles et d’analyses de traces utilisées en archéologie permet de mettre en évidence, d’interpréter et de préserver des indices associés à un corps dans son contexte de découverte. Parmi les principes archéologiques utiles aux recherches, ceux de la stratigraphie (1) appartiennent aux plus connus.

© Vincent Pittard

Dans quel cadre opèrent les acteurs de l’archéologie forensique en Belgique ?

En Belgique, les quelques experts dans le domaine opèrent essentiellement au sein de l’équipe de la Disaster Victim Identification (DVI) composée d’une dizaine de personnes et dont la mission première est la recherche et l’identification de victimes. Cette équipe DVI est une unité de soutien aux Unités Spéciales de la Police Fédérale et n’est jamais, en tant que tel, chargée de l’enquête judiciaire. À la place, elle fournit un support technique aux enquêteurs, tandis que la cellule Personnes Disparues leur fournit un support stratégique.

La DVI travaille avec différents partenaires : la police scientifique, les maîtres-chiens, les médecins légistes, le groupe IBIS (une équipe spécialisée de la Protection Civile), les experts académiques, etc.     

Parmi les cas les plus célèbres, l’équipe DVI a contribué aux recherches liées au désastre du ferry de Zeebrugge (1987), au tsunami qui a frappé la Thaïlande (2004), à l’affaire Fourniret (2004) et à l’accident ferroviaire de Buizingen (2010).

 

Comment se déploie une opération « necrosearch » de la DVI ?

L’équipe DVI intervient également dans le cadre d’affaires, moins fréquentes, de corps cachés ou enterrés illégalement. On parle dans ce cas de « necrosearch ».

Une intervention de ce type se déroule en quatre étapes : la collecte d’informations, la préparation du site de recherche, la recherche et enfin, la fouille. 

Le récolement des données implique la rencontre avec tous les intervenants dans l’enquête : policiers, experts etc. Les informations compilées concernent l’enquête en cours (type de crime, témoins etc.) ainsi que le site à investiguer (plan, imagerie aérienne etc.).

Dans un deuxième temps, la DVI prépare le site de recherche ; elle établit le périmètre de la zone, documente celle-ci et définit les mesures de sécurité et le matériel nécessaire à la poursuite des recherches.

Une fois ces étapes préparatoires bouclées, les équipes cherchent à localiser le corps de la personne disparue. Elles usent en priorité de méthodes non-invasives telles que l’observation, le pistage canin ou le recours aux outils géophysiques.

Enfin, c’est surtout lors de la fouille du site de la scène de crime que les méthodes archéologiques sont utilisées : tamisage du sol de remplissage en vue d’isoler le matériel associé au corps, enregistrement de la position du corps au moment de la découverte, établissement du relevé topographique de la tombe, etc.

 

Le statut des spécialistes belges de l’archéologie forensique

Contrairement à ce qui existe chez nos voisins français et britanniques, aucun statut officiel d’expert en archéologie forensique n’est reconnu en Belgique.

Aucune formation académique spécialisée en archéologie forensique n’est organisée dans notre pays ; la plupart des universités offrent néanmoins des cours ou modules pertinents pour ce domaine d’expertise : anthropologie physique, paléoanthropologie, médecine légale, science forensique…

Deux policiers de la DVI ont été formés aux techniques archéologiques au travers de ces cours universitaires. Seul l'un des deux appartient encore à l’équipe DVI aujourd’hui.

En France, les archéologues forensiques sont employés par l’Institut National de Recherches en Archéologie Préventive (INRAP) tandis qu’au Royaume-Uni, où s’est vu l’essor d’une "archéologie commerciale", des sociétés privées offrent des services de consultance en archéologie forensique.



Remerciement : Merci à Alexandra Boucherie, assistante et doctorante au sein du CReA-Patrimoine, Université libre de Bruxelles, pour son aide préalable à l’écriture de cet article.



Article de référence :

Van Denhouwe B. & Schotsmans E.M.J., DVI Belgium : victim identification and necrosearch, in Groen M. et al. (éd.), Forensic Archaeology: A Global Perspective, 2015, pp.9-17, disponible en ligne

https://www.researchgate.net/publication/281931594_DVI_Belgium_victim_identification_and_necrosearch



Annabelle OLIVA

Diplômée en archéologie

www.retrace.agency



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(1) Procédé de recherche archéologique qui consiste à décaper le terrain par strates pour distinguer les différentes couches d'un site, déterminer leur succession et, donc, leur chronologie.

 

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