La police face au phénomène AMOK

Les tueries de masse se déroulent selon plusieurs modes opératoires (set and run killers, pseudo-commandos, etc.). Parmi ceux-ci, l’AMOK tient une place particulière. Quelle est son origine ? Comment le définir ? Comment la police s’y prépare ?

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Origine et définition

Sans doute dérivé du malais « amuk », pour « rage incontrôlable », le terme désignait à l’origine le comportement de personnes agissant seules, prises d’une rage meurtrière, dont le dessein vengeur se terminait par leur mort. Il était surtout perpétré dans des pays asiatiques. Mais le phénomène a fait tache d’huile et s’est répandu dans les pays occidentaux.

Repris dans une circulaire ministérielle (GPI 48 bis), le concept « d'incident AMOK désigne un événement au cours duquel une ou plusieurs personnes, en un endroit donné, agressent les personnes présentes et tentent de faire le plus grand nombre de victimes, sans chercher à se retrancher ou à prendre des otages.

Les spécificités des incidents AMOK sont les suivantes :

  • l'auteur se déplace à volonté (ne se retranche pas, ne s'encombre pas d'otages)
  • il tente de tuer/blesser les personnes présentes
  • beaucoup de personnes (victimes potentielles) sont encore présentes. »

     

Causes du phénomène

Comme dans le cas d’autres tueries de masse, il semble que l’une des motivations principales de l’amok soit de l’ordre de l’extrême frustration chez l’auteur, faisant naître un profond sentiment de haine et provoquant un désir de vengeance.

D’aucuns considèrent que le mécanisme qui sous-tend le passage à l’acte est celui de la « décompensation psychiatrique » qui correspond à une rupture de l’équilibre psychologique à l’origine de symptômes graves (délires, hallucinations, …).

Souvent l’auteur trouve la mort, particulièrement en se suicidant, moyen pour lui de se libérer des pulsions insoutenables qui l’assaillent.

 

La police s’adapte

En complément à la circulaire relative à la formation et l'entraînement en maîtrise de la violence des membres du personnel du cadre opérationnel des services de police (GPI 48), une directive ministérielle envisage les situations AMOK (GPI 48 bis). Il s’agit de la « procédure AMOK » qui trouve ses particularités dans les motivations spécifiques de l’auteur.

Ainsi, lorsqu’un incident est annoncé, la police a pour première tâche de réunir des renseignements et de procéder à une rapide analyse. Il a donc été indispensable de former les « call-takers » qui prennent les appels d'urgence du 101 ou 112 et les dispatchers des CIC (centres d'information et de communication).

Par contre, si les informations font apparaître que l’incident est un AMOK, on doit prendre en compte que l’auteur cherchera à maximiser le nombre de victimes et la finalité de l’action policière consistera avant tout à le neutraliser sans délai.

On notera que sa mise hors d’état de nuire passera avant l’assistance aux victimes qui n’aura lieu qu’après s’être assuré que tout danger est écarté.



Formation

La formation du personnel policier porte sur les procédés tactiques attendus des premiers intervenants. A noter qu’elle est aussi complétée par un volet spécifique destiné aux cadres moyens et officiers et portant sur la gestion des faits.

En résumé, il s’agit de :

  • Apprendre les comportements adéquats : recherche de l’auteur, coordination des actions, étapes de l’intervention, etc. ;
  • Les rôles : qui fait quoi ? Occupation des lieux, gestion des suspects, etc. 

Il va de soi que la formation habituelle en maîtrise de la violence se poursuit dans le cadre de la formation continue et qu’elle intègre les procédures AMOK.

 

Que dit la loi ?

En cas d’AMOK, la neutralisation de l’auteur est envisageable parce qu’il s’agit de protéger les victimes potentielles d’une attaque en cours mettant en jeu leur intégrité physique voire leur existence même. L’action policière sera alors conforme aux dispositions du code pénal concernant la légitime défense (art. 416 et 417) et à la loi sur la fonction de police concernant le recours à la violence et l’utilisation des armes à feu (art. 37 et 38).





Claude BOTTAMEDI

Chef de corps d’une zone de police er



Sources :

Dietz, P. E. (1986). Mass, serial and sensational homicides. Bulletin of the New York Academy of Medicine, sur : https://www.researchgate.net/publication/19694196_Mass_serial_and_sensational_homicides

Circulaire GPI 48bis  du 17 août 2012 relative à l'intervention lors d'incidents AMOK et complétant la circulaire GPI 48 du 17 mars 2006 relative à la formation et l'entraînement en maîtrise de la violence des membres du personnel du cadre opérationnel des services de police, sur :

https://www.ejustice.just.fgov.be/cgi/article_body.pl?language=fr&caller=summary&pub_date=12-08-31&numac=2012000541

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