Harcèlement scolaire : Aider la victime à faire face

De nombreux enfants sont victimes de brimades ou de violences exercées par des pairs à l’école. Parmi les stratégies de lutte contre le harcèlement scolaire, il est essentiel de renforcer l’assertivité et d'encourager la victime à faire face.

© Kato Peeters

Quand parle-t-on de harcèlement scolaire ?

Le phénomène de harcèlement scolaire est théorisé dans les années 70 par un psychologue suédois à la suite de plusieurs suicides d’enfants. Il est défini par un abus de pouvoir agressif et systématique sur le long terme. Moqueries, insultes, menaces, bousculades, violences, messages menaçants ou insultants, sont autant de manifestations du harcèlement qui inquiètent. En effet, 85% des parents rapportent être préoccupés à l’idée que leur enfant puisse en être victime.

Afin de distinguer le harcèlement scolaire de la violence classique, 3 caractéristiques sont importantes :

  • Le déséquilibre des forces: la victime est en situation de faiblesse par rapport à son agresseur.
  • L’intentionnalité: l’auteur cherche à nuire ou à blesser la personne harcelée.
  • La répétitivité: les agressions sont régulières même si leur nature change.

 

Quelles conséquences ? 

  • La perte de l’estime de soi
  • Des troubles de l’humeur
  • Des troubles anxieux et des phobies scolaires.
  • Un absentéisme chronique et un décrochage scolaire.
  • Des conduites à risque (consommation d’alcool ou de substances).
  • Des comportements violents (automutilations, agressions)
  • Dans les cas les plus graves, des tentatives de suicide et le suicide.

 

Les principales stratégies de lutte contre le harcèlement scolaire 

Deux types de stratégies sont habituellement proposées :

  • D’une part, des actions collectives de prévention avec l’objectif de sensibiliser les jeunes aux conséquences du harcèlement scolaire (groupes de paroles, témoignages, exercices de mise en situation afin de favoriser l’empathie).
  • D’autre part, l’intervention d’un tiers afin de faire cesser la relation de harcèlement qui peut prendre différentes formes :
    1. Sanctionner le harceleur.
    1. La méthode des préoccupations partagées qui consiste à tenter de mobiliser l’empathie de l’auteur pour sa victime, afin de l’amener à changer de comportement et à cesser le harcèlement.
    1. Les pratiques réparatrices où il est demandé à l’auteur de tenter de réparer le mal qu’il a fait subir, demander pardon.
    1. La mobilisation d’un groupe d’élèves pouvant soutenir la victime, lors des récréations notamment.

Ces stratégies obtiennent, selon les motivations et les compétences des éducateurs, des résultats, mais elles peuvent aussi se révéler contre-productives. En effet, en intervenant de la sorte, le message suivant est envoyé au jeune harceleur : la victime est faible et ne peut rien contre lui. Cela risque de ne pas diminuer les attaques mais au contraire, de les augmenter. De plus, la victime ne fera pas l’expérience de pouvoir solutionner une situation critique par ses propres moyens, et il est fort probable, qu’elle soit tout aussi démunie si une situation similaire se présente à nouveau.  

 

Décoder le profil des harceleurs

Le harceleur aurait pour objectif d’acquérir une position sociale dominante dans le groupe de pairs. Deux profils opposés se détachent : 

  • Le harceleur réactif : il présente des déficits au niveau des compétences sociales et dans ses relations interpersonnelles. Il va attribuer des intentions hostiles à ses pairs et y réagir très agressivement.
  • Le harceleur stratégique : il possède des compétences sociocognitives élevées, qu’il va utiliser pour dominer et manipuler les plus faibles.

Les deux profils rencontrent des carences en empathie affective. Ils ne parviennent pas à se mettre à la place des autres et à ressentir leurs émotions. De plus, ils font preuve d’un désengagement moral important.

Ces différents points expliquent pourquoi les stratégies interventionnistes ont un faible impact sur eux. Ils n’ont aucun avantage à changer de comportement.

 

Travailler avec la victime

Face à ce constat, il est plus judicieux de se centrer sur le jeune, victime de harcèlement, qui est lui, très motivé pour que la situation change. Il sera essentiel qu’il puisse développer les ressources nécessaires pour faire face à la situation. Il devra se confronter seul au harceleur, et lui montrer qu’il n’accepte plus ses brimades. Pour cela, le jeune pourra être aidé par un éducateur ou un psychologue, qui cherchera à identifier avec lui, les différents comportements et attitudes présents au quotidien, et qui peuvent être autant de messages de faiblesse envoyés à son agresseur.

L’idée sera de prendre le contrepied de ces comportements afin d’envoyer un message contraire : « je n’ai pas peur de toi ». Il n’évitera plus certaines situations, il ne se cachera plus, il ne rasera plus les murs, il ne baissera plus la tête, il ne fuira plus le regard, il osera s’exprimer.  Cela aura pour conséquence de faire vivre au jeune harcelé, une expérience émotionnelle correctrice, qui viendra changer sa perception de la réalité, et augmenter sa confiance en soi. Il aura le sentiment qu’il peut se défendre seul. De facto, son profil n’intéressera plus le harceleur.



Mélanie SAEREMANS

Psychologue-Psychothérapeute

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Référence :

Https://theconversation.com/harcelement-scolaire-les-points-faibles-des-strategies-de-lutte-actuelles-158927

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