Comprendre et prévenir le "binge drinking" chez les jeunes

Le "binge drinking" ou biture express, est une pratique largement répandue chez les adolescents et les jeunes adultes, notamment dans les milieux estudiantins. Cette consommation massive d’alcool, dans un laps de temps réduit, n’est pourtant pas sans conséquence.

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Quand parle-t-on de binge drinking ?

Ce phénomène consiste à s’enivrer le plus rapidement possible en buvant une quantité d’alcool importante dans un laps de temps très court (moins de deux heures). L’objectif est d’atteindre un état d’ivresse intense le plus rapidement possible.

Cette pratique est née en Angleterre, mais fait ravage dans l’Europe entière, surtout auprès des populations jeunes, et dans les milieux estudiantins où ce rite initiatique peut rapidement devenir hors contrôle. Certains adultes plus âgés peuvent également être touchés dans le cadre d’activités sportives et de loisirs.  





Les motivations 

Le contexte culturel et la société actuelle valorisent la consommation d’alcool festive. Les représentations sociales qu’une fête sans alcool n’est pas une fête réussie, sont encore d’actualité et la publicité vise différentes cibles avec des produits tantôt féminins, tantôt virils ou plus juvéniles.

Dans le milieu estudiantin, la consommation excessive d’alcool a toujours été mise en avant et devient une nouvelle norme pour les jeunes. Pour preuve, l’élection du roi des bleus, qui incarne dans les festivités de baptêmes celui qui parvient à ingurgiter le plus grand nombre de verres d’alcool. L’étudiant qui se hissera à ce rang, deviendra une figure valorisée par ses pairs.

Les motivations du binge drinking peuvent être de différentes natures :

  • Une recherche de plaisir et d’amusement et au-delà, une façon de lever ses inhibitions : oser communiquer avec les autres, se sentir plus à l’aise et audacieux.
  • Une quête de liberté.
  • Une façon de tester ses limites : se dépasser en se mettant en danger.
  • Obtenir l’approbation sociale en se comparant aux autres et en s’exhibant dans une forme de surenchère. Cela dénote une volonté d’être intégré à un groupe social d’appartenance et peut générer une valorisation importante qui augmente l’estime personnelle. A contrario, certains peuvent se sentir piégés et forcés de faire comme les autres par manque de confiance afin de s'intégrer au groupe.



Le binge drinking : une activité sans risque ?

L’alternance entre consommation excessive et période de sevrage impacte le cerveau qui est en pleine maturation. La plupart des jeunes ont une méconnaissance des risques encourus et en minimisent les conséquences. Ils banalisent cette pratique en affirmant qu’elle est différente d’une addiction à l’alcool, étant donné qu’ils peuvent aisément se passer de consommer pendant plusieurs jours. Pourtant, les études montrent qu’un à deux binge drinking par mois à l’adolescence sont associés à une augmentation importante (2 à 6 fois plus) du risque de dépendance à l’alcool et de difficultés psycho-sociales à l’âge adulte. Ces jeunes présentent également un risque 5 à 10 fois plus élevé de faire un séjour aux urgences en lien avec leur consommation d’alcool.

De plus, il n’est pas rare que les jeunes consomment avant de se rendre en soirée et ensuite à l’évènement en tant que tel, ce qui double leur consommation. Ce phénomène est appelé le « pré-drinking ».

Les dangers immédiats sont nombreux :

  • Des intoxications aiguës avec présence d’amnésies partielles.
  • Des comas éthyliques avec un risque létal.
  • Des troubles digestifs, des nausées et des vomissements avec risque d’étouffement.
  • Une augmentation rapide de la tension artérielle.
  • Des arrêts cardiaques.
  • Des troubles du comportement menant à des violences, des agressions sexuelles, ou encore une conduite automobile dangereuse en tant qu’auteur ou victime.

À plus long terme, d’autres risques peuvent apparaître :

  • Une altération de la faculté de penser et du sens critique.
  • Des troubles d’apprentissage, de mémoire et d’attention pouvant impacter négativement la scolarité avec des effets à long terme sur l’avenir.

Même s’il n’y a pas de lésions cérébrales comme dans la dépendance à l’alcool, les effets du binge drinking sur le cerveau ne seront réversibles qu’après plusieurs mois voire plusieurs  années.





Comment limiter ce phénomène ? 

Des études de prévention réalisées en Suisse ont montré que les interventions en milieu festif sont les plus efficaces, et particulièrement lorsqu’elles sont effectuées par d’autres jeunes.

Les adultes et les parents en particulier peuvent également se trouver fort démunis devant ces comportements. Il sera essentiel d’ouvrir le dialogue et de montrer l’exemple.

  • Favoriser dès le plus jeune âge, l’apprentissage et la pratique de l’affirmation de soi en contexte social : apprendre à dire non ne fait pas de soi un ringard ou une personne de moindre valeur. Au contraire, cela témoigne d’une bonne confiance en soi.
  • Comprendre les motivations du jeune et dialoguer sans tabou et sans moraliser en tentant de faire évoluer les représentations sociales véhiculées par le binge drinking.
  • Ne pas banaliser la consommation d’alcool à la maison.
  • Retarder le plus possible l’âge de la première consommation d’alcool jusqu’à l’âge de minimum 16 ans et si possible plus tard en favorisant la modération.
  • Prévenir et discuter des accidents susceptibles de survenir sous l’effet de l’alcool en mettant l’accent sur les risques et les conséquences possibles de ce type de pratique, en utilisant des témoignages et des images réels véhiculés via les canaux de communication prisés par les jeunes.
  • Aborder spécifiquement la question de la conduite automobile : ne pas conduire ou monter dans une voiture en tant que passager si le conducteur a bu et par ailleurs, empêcher une personne de prendre le volant en cas de consommation.
  • Faire appel à son médecin de famille ou à un psychologue si la situation semble devenir hors contrôle.



Mélanie SAEREMANS

Psychologue-Psychothérapeute



Site utile : https://aide-alcool.be

Références : 

https://www.passeportsante.net/fr/Actualites/Dossiers/Fiche.aspx?doc=binge-drinking

https://www.rtbf.be/lapremiere/emissions/detail_tendances-premiere/accueil/article_apres-un-an-de-binge-drinking-le-cerveau-est-durablement-moins-efficace?id=10824825&programId=11090

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