A quelles conditions un policier peut-il faire usage de son arme à feu ?

L’usage de l’arme à feu contre des personnes par un policier est subordonné à des conditions strictes précisées par la loi. Outre la légitime défense, certaines situations spécifiques sont limitativement prévues.

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Utilisation de la contrainte



Tout d’abord, l’usage de l’arme de service est considéré comme étant une mesure de contrainte policière à laquelle les policiers peuvent recourir dans les limites des principes généraux de :

la légalité et de la légitimité, à savoir respecter la loi et poursuivre un objectif juste ;

la subsidiarité, c’est-à-dire envisager si le but visé ne peut pas être atteint d’une manière moins contraignante (ex : la négociation) ;

la proportionnalité ou de l'équilibre entre la force utilisée et la résistance opposée. Ainsi, répondre par des coups de matraque à une légère bousculade ne sera pas proportionné ; 

l’avertissement préalable. Tout recours à la force doit être, dans la mesure du possible, précédé d’un avertissement pour autant que celui-ci ne rende pas le recours à la force inopérant. Ainsi, la personne avertie aura encore la possibilité d’éviter d’être contrainte en s’exécutant ou en adoptant le comportement attendu. 





Hypothèses d’utilisation de l’arme à feu



Les fonctionnaires de police ne peuvent faire usage d'armes à feu contre des personnes que dans les cas suivants :



La légitime défense

Pour qu’un policier voire tout autre citoyen puisse évoquer la légitime défense, il faut que toutes les conditions suivantes soient réunies simultanément :

  1. L’agression qui la justifie sera commencée ou imminente et la réponse actuelle c’est-à-dire quand les faits ont lieu et non plus quand le danger est écarté. Frapper une personne maîtrisée est donc exclu ;
  2. Il s’agit de se protéger ou de protéger autrui et non des biens ;
  3. L’agression doit être illégale et injuste ;
  4. La défense doit être proportionnée à l’attaque. On comprendra que celle-ci doit être grave pour que l’usage de l’arme à feu se justifie. Autrement dit, elle fait craindre un péril sérieux pour l’intégrité du policier. Par exemple, ce ne sera pas le cas pour répondre à une gifle.  

Il convient de préciser qu’en situation de légitime défense, le policier peut faire usage de son arme à feu sans avertissement préalable.





Contre des personnes armées ou en direction de véhicules à bord desquels se trouvent des personnes armées



En cas de flagrant crime ou de flagrant délit, commis avec violences, le fonctionnaire de police peut tirer sur des personnes ou en direction d’un véhicule qui prend la fuite à condition qu’il puisse raisonnablement supposer que ces personnes disposent d’une arme à feu prête à l’emploi et qu’elles l’utiliseront contre d’autres personnes. Dans la mesure du possible, l’usage de l’arme à feu doit être précédé d’un avertissement (à haute voix ou par un coup de semonce), à moins que cela ne rende le recours à l’arme à feu inopérant.





En cas d’absolue nécessité, pour protéger des personnes, des postes, des lieux ou le transport de biens dangereux confiés à leur protection



L’usage de l’arme ne peut se faire que conformément aux instructions d’un officier de police administrative qui ne doit pas nécessairement être présent au moment des faits mais qui doit avoir donné ses instructions au préalable. Cette hypothèse ne concerne pas le transport d’argent ou de biens de valeur mais plutôt des biens dangereux tels des armes, des explosifs, des matières nucléaires. L’usage de l’arme à feu doit être, en principe, précédé d’un avertissement.





En cas d’absolue nécessité, pour défendre des personnes qui sont confiées à leur protection dans le cadre de missions judiciaires



On vise notamment la protection de témoins mais pas les transferts de détenus. Lors d’un transfèrement d’un détenu, l’usage de l’arme à feu pourra, le cas échéant, être justifié sur base des deux premières hypothèses susmentionnées. L’usage de l’arme ne peut se faire que conformément aux instructions d’un officier de police judiciaire qui ne doit pas nécessairement être présent au moment des faits mais qui doit avoir donné ses instructions au préalable ou se référer à des instructions générales. L’usage de l’arme à feu doit être, en principe, précédé d’un avertissement.





Dégainer l’arme de service



Le fait de simplement dégainer l’arme de service (et de donner d’éventuelles injonctions) n’est pas considéré comme étant un usage d’arme car il n’y a pas eu de tir effectif.

Il n’en reste pas moins que le fait de dégainer l’arme est assimilé à une contrainte morale qui doit, comme toute forme de contrainte, répondre aux conditions indiquées en début d’article.

 

Christophe ROMBOUX

Commissaire divisionnaire

Chef de corps de la zone de police ORNEAU-MEHAIGNE

Claude BOTTAMEDI

Chef de corps d’une zone de police er

 

Référence bibliographique : Vademecum du policier de terrain 2022 – Police pocket  - Claude BOTTAMEDI, Christophe ROMBOUX, Editions Kluwer, Liège, 2022, 795 pages.

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